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Public History of the Holocaust Conference - Historical Research in the Digital Age

Autor / Autorin des Berichts: 
Zitierweise: Natale, Enrico: Public History of the Holocaust Conference - Historical Research in the Digital Age, infoclio.ch Tagungsberichte, 2013. Online: infoclio.ch, <http://dx.doi.org/10.13098/infoclio.ch-tb-0072>, Stand:


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La conférence "Public History of the Holocaust - Historical Research in the Digital Age" a eu lieu le 9 juillet 2013 au Musée juif de Berlin, organisée conjointement par DARIAH, Textgrid, et EHRI - trois grands projets d'infrastructure numérique pour les sciences humaines - sous le patronage du Ministère allemand pour la recherche et l'éducation.

La conférence réunissait plus d'une centaine de personnes dans le grand hall de réception du Musée juif de Berlin construit par l'architecte Daniel Libeskind. Première à prendre la parole, la Ministre allemande de l'éducation et de la recherche, Dr. Johanna Wanka, a annoncé l'ouverture d'un nouveau Centre international de recherches sur l'holocauste à Münich, financé par son ministère, de même que l'ouverture récente du Berlin-Brandenburg Center for Jewish Studies et d'une nouvelle chaire en Histoire de la musique juive à Weimar. La Ministre a également confirmé que la mémoire de l'holocauste reste une priorité pour l'Allemagne:

Remembering the Holocaust - the years of oppression and dictatorship - is part of our social tradition in the Federal Republic of Germany. Democracy in Germany could only thrive because we actively engaged in reflection and debate on our own history. In this way, we have developed a culture of rememberance which we want to preserve and enhance.

L'Allemagne a fait de la mémoire de l'holocauste une priorité nationale, en particulier depuis la chute du mur de Berlin et la réunification du pays en 1989, comme l'explique Christoph Cornelissen sur Docupedia. Bien que certaines initiatives aient déjà vu le jour dans les années 1970, c'est depuis la réunification qu'une véritable mémoire collective a été introduite, soutenues par un fort volontarisme politique et des programmes d'éducation et de recherche spécifiques. Cette Erinnerungskultur est présente en outre dans le tissus urbain de la capitale allemande, avec le Musée juif de Berlin, devenu en dix ans l'un des musées les plus visités de la capitale, et le Mémorial de l'holocauste, qui s'étend sur près de 20'000 m2 à deux pas du Reichstag, siège du Parlement allemand. Le national-socialisme et l'extermination des juifs d'Europe ont été systématiquement introduits dans les manuels scolaires, et des chaires spécialisées ont vu le jour dans la plupart des universités. Le national-socialisme en général, et les persécutions contre les juifs et autres minorités en particulier, sont l'un des domaines de recherche les plus dynamiques en Allemagne, comme en témoigne les actualités de H-Soz-u-Kult, un service d'information pour historiens. Un autre phénomène plus récent, lié au précédent, est l'intérêt renouvelé des chercheurs pour les formes de commémoration du nazisme et de l'holocauste, c'est-à-dire pour l'Erinnerungskultur en elle-même comme objet de recherche.

C'est d'ailleurs à l'occasion de la commémoration du 65e anniversaire de la fin de la deuxième guerre mondiale qui a été donnée l'impulsion de départ au projet European Holocaust Research Infrastructure (EHRI), comme l'a rappelé Robert-Jan Smith, directeur de la recherche à la Commission européenne et initiateur du projet. Doté d'un budget de 7 millions d'euro, EHRI est censé favoriser la collaboration entre les centres européens de recherches sur l'Holocauste et les doter d'une infrastructure numérique commune.

Dans son intervention sur la mémoire de l'holocauste, l'historien belge Georgi Verbeeck a voulu rappeler que la mémoire de l'holocauste est un socle commun sur lequel s'est construit l'ordre international de l'après-guerre. S'appuyant sur les travaux de l'historien Tony Judt, Verbeeck constate l'existence d'une Grand Narrative de l'holocauste, une narration symbolique autours de laquelle les pays européens et la communauté internationale ont construit des relations internationales censées d'empêcher la répétition des horreurs de l'holocauste. Pour reprendre les termes de Verbeeck:

Auschwitz has become the benchmark of Post-war Europe.

Le risque d'un telle mémoire exemplarisée, poursuit l'historien, est que la commémoration de l'holocauste est étroitement identifiée à l'ordre international d'après-guerre, si bien que les personnes ou les états qui s'opposent à cet ordre seront tentées de nier cette mémoire.

Un autre élément d'analyse apporté par Verbeeck dans son intervention concerne le dilemme entre unicité et comparatisme dans la mémoire de l'holocauste. En défendant l'unicité de l'holocauste et en refusant la comparaison avec les autres génocides survenus avant et depuis, on prend le risque minimiser la gravité des actes de violences systématiques contre d'autres populations, et de manquer de répondre à des situations de crise, comme lors du génocide du Rwanda de 1994. A l'opposé, en niant les spécificités de l'holocauste commis par les nazis, on risque de passer à côté de ses caractéristiques intrinsèques qui en font un évènement sans précédent dans l'histoire des sociétés industrialisées.

Le reste de la manifestation s'est organisé autours de la présentation des trois principales institutions dépositaires des archives sur l'holocauste au niveau mondial, à savoir le Yad Vashem de Jersusalem, le United State Holocaust Memorial de Washington et le International Tracing Service de Arolsen en Allemagne.

Dina Porat, chief historian au Yad Vashem, a rappelé les caractéristique de son institution, fondée par le parlement israélien en 1953 pour collecter et conserver les archives et les témoignages sur l'holocauste et s'engager dans des activités de recherche et d'éducation. Plus de 400'000 survivants de l'holocauste se sont établis en Israël après la guerre, dont environ 100'000 sont encore vivants aujourd’hui. Les témoignages de ces survivants constituent l'une des principales ressources du Yad Vashem. Des milliers des témoignages ont ainsi été enregistrés au cours des années et partiellement publiés en ligne. L'autre grande ressource du Yad Vashem est la Central Database of Shoah Victims' Names, qui identifie 4.2 millions de personnes par leur nom et lieu de naissance sur les quelques six millions de victimes juives estimées de l'holocauste. Un inventaire sommaire des fonds archives conservées au Yad Vashem est disponible en ligne (PDF).

S'exprimant sur les nouvelles possibilités offertes par le web, Dina Porat note les risques d'une exposition incontrôlée des témoignages de survivants, qui nécessitent une réflexion approfondie sur les rapports entre la sphère privée et le domaine publique avant d'être rendus publics. Elle note de même que les contenus mis sur le web sont au-dehors de tout contrôle, et présentent un risque de distorsion ou de falsification. Le web présente néanmoins une opportunité sans précédent pour atteindre de nouveaux publics, et le site du Yad Vashem, disponible en 7 langues et riche de nombreux contenus didactiques et multimédias, est là pour explorer ces nouvelles possibilités.

Encore plus au fait des nouvelles technologies du web, le United State Holocaust Museum Memorial se veut un exemple pour sensibiliser de nouveaux publics à la mémoire de l'holocauste. Son site web traduit en 15 langues, et riche de nombreuses ressources adaptées à tous genres de public, vise, selon les mots de sa directrice Sara Bloomfield, "To be able to reach as much people as possible, everywhere, all the time." Parmi les nombreuses ressources disponibles, l'Encyclopédie multimédia de la Shoa permet de se faire rapidement une idée sur des aspects concrets de l'holocauste, comme la Révolte du ghetto de Varsovie ou les Marches de la mort de 1944, en renvoyant vers des documents d'archives.

Convaincue des possibilités qu'offre web comme nouveau territoire pour l'histoire dans l'espace public, Sara Bloomfield présente les différentes initiatives numériques que le musée à engagées, dont plusieurs s’appuient sur le modèle du crowdsourcing, soit pour identifier des individus sur des photographies anciennes, soit pour établir un index des noms contenus dans les collections d'archives. Pour les chercheurs, le site propose également une série d'outils de recherche dans ses collections, composées de quelques 42 millions de documents.

L'International Tracing Services (ITS) est la moins connue des institutions gardiennes de la mémoire de l'holocauste. Fondé en 1943 par l'état major général des forces alliées, l'ITS avait pour mission de récolter des informations sur les civils persécutés, détenus ou déplacés et sur les travailleurs forcés. A la fin de la guerre, l'ITS est tranféré dans la ville de Arolsen, "parce que cette ville, située au centre des quatre zones d’occupation, disposait de grands bâtiments non détruits ainsi que de réseaux télégraphiques et téléphoniques intacts." (Citation) L'essentiel de sa documentation provient des archives confisquées aux administrations nazies lors de l'invasion de l'Allemagne, ce qui lui vaut la réputation d'être la "plus grande archive nazie" au monde. En 1955, la gestion de l'ITS est confiée par les Alliés au CICR de Genève, qui en assure le fonctionnement jusqu'en 2012. Jusqu'en 2007, les documents étaient fermés au public et servaient uniquement à retracer les personnes disparues.

Aujourd'hui l'ITS veut se transformer en une institution de recherche historique sur les victimes civiles de la deuxième guerre mondiale, comme l'explique sa directrice Rebecca Boehling. Les 30 millions de documents conservés sont en cours de numérisation et de nouvelles collaborations avec des instituts de recherche sont établies. Un inventaire général en ligne offre un aperçu des fonds conservés et de leur cadre de classement.

La journée s'est ensuite poursuivie avec une présentation des activités du Deutsches Bundesarchiv par sa vice-présidente Angelika Menne-Haritz et une table ronde réunissant diverses personnalités autours de la question de l'avenir de l'histoire sur le web. Le programme détaillé de la conférence est consultable en ligne.

 

Veranstaltung: 
Public History of the Holocaust - Historical Research in the Digital Age
Organisiert von: 
Dariah, Ehri, Texgrid und Bundesministerium für Bildung und Forschung
Veranstaltungsdatum: 
09.07.2013
Ort: 
Jüdisches Museum, Berlin
Sprache: 
f
Art des Berichts: 
Conference