Fondé en 1944 dans le canton de Neuchâtel, le Parti ouvrier et populaire neuchâtelois (POP) se compose à ses débuts d’ancien·ne·s militant·e·s communistes, de membres du Front antifasciste, de partisan·e·s issu·e·s de l’aile gauche du Parti socialiste ainsi que d’individus sans affiliation politique préalable. S’il entend dans un premier temps se distancer de l’héritage du Parti communiste interdit en 1937 sur le territoire neuchâtelois, le POP neuchâtelois prône le « rassemblement populaire » et se revendique représentant de la classe ouvrière. Cette nouvelle formation d’extrême gauche se distingue par ses succès électoraux initiaux qui la consacre comme deuxième force politique derrière les socialistes dans les villes de La Chaux-de-Fonds et du Locle. À l’interne, le parti développe une culture politique englobante qui s’attache à encadrer ses adhérent·e·s selon les principes du marxisme- léninisme. Les fondateurs et militant·e·s de la première heure mettent rapidement en place une organisation et des structures locales qui favorisent le développement d’une vie partisane riche.
À l’échelle nationale, le POP neuchâtelois se rattache au Parti suisse du Travail (PST), également créé en 1944. Si l’intensité des actions menées par les sections cantonales du parti varie en fonction des réalités régionales, le PST est présent à ses débuts dans les trois régions linguistiques de Suisse. Mais le parcours des sections du PST se trouve bientôt semé d’embûches, à mesure qu’un climat anticommuniste impulsé par de nouvelles circonstances internationales s’installe en Suisse. Les mesures prises par les autorités fédérales pour la protection de l’État donnent lieu à une surveillance accrue des organisations proches du mouvement communiste. Le militantisme intense et prolifère des sections du PST n’échappe pas à cette surveillance exercée par les polices cantonales en collaboration avec la police fédérale qui, depuis la Deuxième Guerre mondiale, redoublent de moyens pour écouter, contrôler et ficher les sympathisant.e.s communistes.
Les liens idéologiques et fraternels que le POP neuchâtelois entretient avec plusieurs partis communistes à l’étranger ainsi que la fascination de plusieurs de ses membres pour le modèle soviétique ajoutent une dimension internationale à l’histoire du parti. Les événements successifs qui bouleversent le mouvement communiste international dans les années 1950 et 1960 impactent aussi le parti politique que nous étudions.
Ce mémoire retrace les vingt premières années de l’histoire du POP neuchâtelois, soit des années 1944 à 1964. Il questionne la manière dont ce parti se positionne, se définit et se redéfinit à la croisée des dynamiques cantonales, nationales et internationales qui le conditionnent pendant la guerre froide.